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6 avril 2009 1 06 /04 /avril /2009 22:49

Imaginez un monde où le divertissement serait Art… Imaginez un monde où lorsque vous allumeriez la télévision, la radio, vos yeux et vos oreilles seraient toujours intellectuellement  stimulés, où votre plaisir serait toujours contenté.

Ce monde, un homme l’a rêvé pour vous. Grand manitou des médias et de l’audiovisuel, responsable de la médiocrité des programmes et, à l’approche de la mort, Foster  Lipowitz décida un jour , pour sa rédemption, de relever le niveau.

Il met en place une puissance secrète, une sorte de « générateur de génie » qui alimentera le monde des médias, afin de faire remonter le niveau culturel des masses populaires. Pour ce faire, il va, dès leur plus jeune âge, sélectionner des artistes, auteurs,  compositeurs ,  écrivains, destinés à rester dans l’ombre mais qui, par leur talent, sauront servir ses desseins les plus ambitieux.

L’histoire est racontée par Harlan Eiffler, ancien chroniqueur musical et nouvel engagé de l’empire Lipowitz. Il nous présente  systématiquement chaque nouveau personnage en citant ses groupes, émissions et films favoris (c’est fou ce qu'on  peut connaître d’une personne avec ces simples renseignements). Il est chargé de coacher,  surveiller , influencer et, finalement, contrôler la vie de Vincent, prodige en devenir, un des espoirs de « Nouvelle Renaissance », la société créée par Foster Lipowitz.

Mais à quel prix ? Partant du principe qu’un artiste de talent puise dans sa souffrance personnelle pour créer, Harlan va s’ingérer dans la vie de Vincent, lui évitant volontairement tout bien-être , tout bonheur immédiat ou à venir. Il ne sera pas heureux, c’est un fait établi, il ne rencontrera pas l’amour, il ne recevra ni reconnaissance ni argent du fruit de son travail, toute satisfaction de quelque ordre que ce soit lui sera supprimée, les petites amies potentielles, écartées, la famille aimante, effacée, les amis,  reniés.

«  L’idée d’un artiste tourmenté semble étrange à notre époque, n’est ce pas ? Quand les artistes d’aujourd’hui connaissent le succès, ils goûtent la gloire, la richesse et l’amour qui émoussent leur côté artistique. Nombre d’entre eux n’ont même pas de talent au départ, et s’ils connaissent une sorte de tourment, celui-ci est souvent auto-infligé. La star de base connaît l’alcoolisme, la drogue, les mariages adultères, les appétits sexuels excessifs, et la dépression. En plus de la dépression, les problèmes naissent souvent de leur mode de vie hédoniste. Il n’existe pas de réelle souffrance de nos jours. Une fois de plus, tout est orienté vers le plaisir chez ces fêtards bien payés .Nous nous efforcerons de rechercher et développer l’exact opposé des millionnaires hédonistes qui nous ont divertis et ont façonné notre culture imbécile. Nous encouragerons notre artiste non par des récompenses telles que l’argent, la gloire et le sexe, mais par la privation. Nous ne donnerons pas, nous prendrons. »

Ce roman  pose une question essentielle et digne d’un sujet de bac philo : « faut-il avoir souffert pour créer et être considéré comme un artiste ? »

Je me suis fait, pour ma part, trimballée d’un avis à l’autre sur la question. Souvent offusquée par les actes invasifs d’Harlan, parfois rejoignant les desseins utopiques de Lipowitz, j’ai suivi avec ferveur le déroulement des vies parallèles de Vincent et son manager Harlan.

Pygmalion, faiseur de rêves, artiste malgré lui, j’ai aimé Harlan, l’ai soutenu, l’ai haï, je l’ai compris puis désavoué, puis compris à nouveau.  Bref, j’ai vécu ce roman  comme un film, comme un morceau de vie.

Joey Goebel, né en 1980, a été chanteur dans un groupe punk puis critique musical avant de se lancer dans la littérature. Il est considéré aujourd’hui comme l’une des figures montantes de la littérature américaine. « Torturez l’artiste » est son deuxième roman, il semble prendre une revanche sur ses années maudites de chanteur, présentant une satire drolatique du paysage audiovisuel que nous subissons quotidiennement.

J’ai envie de lui dire : « continue comme ça mon gars, on a besoin de toi , ».

Torturez l’artiste , Joey Goebel, traduit de l’américain par Claro, 10/18 Domaine Etranger, 375 pages, 8,20€

Pour voir l'article dans son contexte original, cliquer ici.

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